Interview de Christelle Lison

Professeure au Département de pédagogie de la Faculté d’éducation de l’Université de Sherbrooke (Québec, Canada)

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Christelle Lison CAP

Christelle Lison CAP

Christelle Lison est professeure au Département de pédagogie de la Faculté d’éducation de l’Université de Sherbrooke (Québec, Canada). Spécialisée en enseignement supérieur, elle s’intéresse à la formation des enseignants du postsecondaire et à leur développement professionnel, aux innovations curriculaires et pédagogiques, à l’évaluation de l’enseignement par les étudiants et à ses retombées sur la transformation des pratiques pédagogiques des enseignants, de même qu’à l’encadrement aux cycles supérieurs.
 
  • Elle est intervenue le 3 octobre dernier à l'UPVD sur le thème du développement pédagogique des enseignants du supérieur.
  • Quel thème allez-vous aborder lors de votre intervention ?
Aujourd’hui, je vais parler de ce qu’on appelle le développement professionnel pédagogiques des enseignants du supérieur. Le but est de réfléchir avec eux sur quelles sont les possibilités de leur développement professionnel en matière d’enseignement, d’apprentissage, de réfléchir sur comment on est capable de penser cette transformation pédagogique, de proposer des éléments dans sa pédagogie qui nous permettent de retrouver le plaisir d’enseigner. L’idée est de mettre en avant les opportunités qui nous sont offertes pour pouvoir avoir du plaisir à être en classe, à être avec les étudiants, à penser nos TD, nos TP mais aussi d’autres formats pédagogiques.

 
  • Racontez–nous une expérience en pédagogie innovante…
Ça c’est une grande question… La question de l’innovation pédagogique démarre toujours du contexte dans lequel on se situe. Ce qui est une innovation pour les uns, ne l’est pas forcément pour les autres. Si on pense par exemple l’apprentissage par problème, on considère que c’est une innovation dans certains contextes. Si vous étiez à Sherbrooke en médecine, ce n’est plus du tout une innovation, cela fait 30 ans qu’ils font de l’apprentissage par problème.
Dans mon cas, je me dis qu’il y a pleins de choses que je teste, que je considère comme étant des innovations pédagogiques. Le fait par exemple d’utiliser Twitter lors d’une séance avec des étudiants. J’ai testé une séance où on ne s’est pas parlé si ce n’est par twitter. J’ai donc posé des questions aux étudiants sur twitter et pendant deux heures, nous avons interagi en 280 caractères. C’était vraiment intéressant. Il y a des étudiants qui ont adoré, d’autres qui ont trouvé ça très compliqué parce que ça demande un rythme cognitif assez élevé, d’autres encore n’aimaient pas Twitter…

J’ai testé ça avec des personnes qui sont professeurs. Ça leur a fait prendre conscience aussi que parfois les choix qu’ils font comme pédagogie ne plaisent pas à leurs étudiants, ils réalisent qu’il n’y a aucune forme qui plaît à tout le monde. A partir du moment où j’ai un format unique qui moi me convient, j’ai une partie des étudiants que je ne rejoins jamais. C’est ça l’innovation, c’est d’être capable de se dire : tout ce que je propose n’est pas forcément unique. Par contre il faut être à l’aise avec ce que l’on propose, c’est un point essentiel et ça fait partie du développement professionnel. Mais si on ne se met jamais un peu en danger comme enseignant, si on n’ose jamais une nouvelle forme, on risque de se retrouver dans une routine où on n’est pas forcément bon, ni forcément mauvais, mais on le fait plus par habitude.

 
  • Quels conseils donneriez-vous à nos enseignants ?
Ce n’est jamais facile de donner des conseils ! Je crois que le premier serait d’accepter que tout ce qu’on met en place est perfectible. On ne nait pas enseignant, on le devient. C’est une profession sur laquelle on peut travailler, sur laquelle on peut évoluer, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises manières d’être enseignant. En tout cas, il faut avoir du plaisir dans ce qu’on fait, c’est un conseil essentiel.

L’autre conseil se serait d’essayer d’avoir un équilibre, une force dans le trait d’union d’« enseignant-chercheur » : comment suis-je capable de donner du sens à ce trait d’union ? Ce sont deux aspects qui se nourrissent l’un et l’autre.

Egalement c’est d’être à l’écoute : à l’écoute des étudiants mais également à l’écoute de soi comme enseignant, et comment à partir de ça je peux transformer mon métier, parce qu’on a un métier exceptionnel ! Nous avons des demandes psychologiques élevées mais nous avons une latitude décisionnelle importante. Nous avons plein d’espaces de liberté et parfois, on les prend assez peu, on n’utilise pas leur potentiel. Et c’est ce que je nous encourage à faire collectivement, si on est capables de s’entourer de quelques collègues, là je pense qu’on est vraiment capables de transformer notre métier pour en faire quelque chose d’extraordinaire !

Thématique(s)
Témoignage CAP
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Mise à jour le 21 mars 2022